mardi 26 avril 2011

La médecine en France est devenue médiocre .

2° partie:

La segmentation du corps humain en organes et donc de la médecine en spécialités, aboutit à une perte de la notion de l'ensemble qu'est l'individu global, incluant son physique mais aussi son psychisme et ses conditions de vie. La médecine officielles'est ainsi sectorisée et les cloisons sont devenues sinon étanches  du moins bien marquées. Le spécialiste est souvent devenu un prestataire de service technique, chargé de faire un écho, une IRM, une opération...que la Sécurité Sociale rembourse schématiquement en fonction du volume de l'instrument qu'il utilise ! Le temps nécessire au médecin pour réfléchir, examiner, peser le pour et le contre, en un mot faire de la bonne médecine, n'est pas pris en comptepar le système administratif de paiement. Alors il disparaît.
Les médecines parallèles, malgré l'absence quasi-complète de preuve scientifique de leur efficacité, tirent avantage de leur vision d'ensemble du corps humain, du savoir-faire psychologique  de leurs praticiens et même de l'air du temps et de la mode chez leurs patients. leur argument majeur est d'avoir persuadé la population que si elles ne sont pas efficaces , au moins elles ne font pas de mal. Ce n'est pas toujours vrai mais allez vous promener dans une pharmacie et vous verrez que la para-pharmacie occupe les meilleures places de l'étalage.
Médecine naturelle, médecine par les plantes... Pourtant "la nature nous donne souvent un exemple à ne pas suivre." Jean Rostand.
Sur un plan plus général,  on peut considérer que la médecine moderne a subi trois tentatives de viol.
D'abord, celle de l'industrie pharmaceutique et du matériel médical, qui la pousse et  la fait progresser certes, mais parfois l'entraîne dans des aventures dangereuses pour les malades. Il faut bien vendre ! Cette riche industrie contrôle pratiquement toute l'éducation post-universitaire des médecins et chirurgiens. Elle renforce son message par une publicité agressive utilisant des visiteurs médicaux, l'internet et même les médias grand public, friands d'effets d'annonce et de scoups, quelles qu'en soient la véracité et  la pertinence scientifique.
A l'opposé, deuxième tentative de viol, les systèmes d'assurance, publics et privés, exercent un rôle freinateur, parfois paralysant. Le système obligatoire et monopolistique de la Sécurité Sociale, conçu par des cerveaux marxistes après la deuxième guerre mondiale, a eu une utilité sociale certaine pendant ses trente premières années. Mais beaucoup de paramètres objectifs ont changé  et rien n'a été modifié dans son fonctionnement. Le déripage a pris ici une nouvelle forme : la sécurité sociale est restée sur place pendant que le reste du monde bougeait.  Tout est relatif ! Le système de sécurité sociale que nous subissons depuis plus de vingt ans est devenu aberrant, couteux et mal géré. De l'harmonie à l'absurde en passant par le paradoxe, l'incohérence et la fraude.
Permettez-moi une boutade que l'on pourrait intituler :"les deux bouts de la lorgnette". Si vous allez confier vos problèmes de santé à un médecin, vous attendez de lui qu'il vous donne la meilleure qualité de vie possible pendant le plus longtemps possible. C'est ce qu'exige le Serment d'Hippocrate. Mais si vous considérez le même problème sous l'angle de vision du Ministre de la saté du moment, plus vite vous mourrez, meilleur ce sera ! Moins vous couterez à la société, financièrement parlant. Jacques Attali vous le dit très clairement en proposant "d'éliminer la vie lorsqu'elle sera devenue économiquement trop couteuse."
La troisième tentative de viol est la plus grave et elle est en passe d'aboutir au viol effectif ( de la médecine ! ). C'est la plus dévastatrice pour la qualité des soins. La main-mise de l'administration hospitalière sur les médecins a fait passer l'équilibre financier d'un hôpital au premier rang des préoccupations de tout le monde, même des médecins. L'objectif numéro un des hôpitaux a été lontemps de bien soigner les malades. Ce n'est plus le cas. Maintenant l'objectif primordial est que le budget de l'hôpital soit en équilibre. L'administration s'est développée et a voulu imposer des règles strictes et générales aux médecins et aux malades, presque aux maladies !
"On" c'est à dire l'administration anonyme, a fermé de nombreux hôpitaux. En voulant la réglementer , l'administration a finalement  détérioré la qualité de la médecine. Le déripage principal de la médecine est là : faire passer le contrôle des coûts de la santé  avant la santé elle-même. Si la Sécurité Sociale ne peut assurer les dépenses de santé nécessaires, il faut qu'elle ait le courage politique de l'annoncer clairement au public et ne pas demander aux médecins de se faire ses complices pour le cacher aux malades et à la population en général.
Mais comme les politiciens et syndicalistes ne voulaient surtout pas casser un des systèmes qui leur avait permis de caser leurs copains et de si bien vivre depuis si longtemps, ils ont continué pendant longtremps à pratiquer la politique des multiples rustines sur la chambre à air crevée et complètement usée, seulement bonne à être remplacée. Une avalanche de réformes aussi nombreuses que les ministres successifs de la santé, n'a résolu aucun problème mais a perennisé le système au maximum. La baleine des affiches ! Vous en souvenez-vous ?
Pour couronner le tout, l'enseignement de la médecine a été bouleversé. Pour le pire ! Les sciences dites fondamentales par des mandarins qui n'ont jamais vu un malade, ont pris le dessus sur l'apprentissage de la médecine clinique. Ces patrons n'ont toujours pas compris qu'à côté des sciences fondamentales, utiles mais à doses modérées, l'enseignement de la médecine elle-même ne peut se faire que par une lente osmose entre maitre et élève, au chevet du malade à l'hôpital. La médecine est un artisanat clinique, pas une chaîne industrielle !
L'Internat des Hôpitaux, après concours très élitiste, portant sur des matières médicales, a été une école fantastique de clinique médicale et chirurgicale. Sa qualité a été progressivement démolie par les réformes égalitaristes successives. Il a été aboli dans les années 90. L'élitisme n'est plus guère à la mode. Ce serait tellement plus facile pour l'adinistration si les médecins étaient tous égaux  et interchangeables !
Sur le plan européen, la médecine française,dont la qualité était reconnue jusqu'aux dernières années du XX° siècle, a perdu de son brillant pour les chercheurs, de son attrait pour les médecins et de sa fiabilité pour les malades, surtout pour les moins instruits d'entre eux.
Par contre, je n'ai aucun souci pour l'accueil qui sera réservé, à toute heure du jour et de la nuit à des politiciens ou administratifs de grade élevé au Val de Grâce.
Vous avez  maintenant une médecine de qualité  variable, en fonction de votre orientation initiale. Quand on sait l'importance de la véracité des diagnostics et de la pertinence des décisions initiales en médecine ou en chirurgie... on peut comprendre qu'une population est mieux soignée par mille bons médecins que par cent mille médiocres. Ici encore la qualité aurait dû prévaloir sur la quantité !
Fin de mes réflexions sur la médecine contemporaine en France.